Journal d'une boulimique.

<< J'ai l'impression d'avoir une bombe à retardement dans la tête, et chaque jour, je me demande quand tout va finir par exploser. >>

En général, les gens essayent de s’éviter des souffrances inutiles : les personnes sensées préfèrent se préserver. Quand elles voient un mur, un trou, ou n’importe quel obstacle devant elles, en toute logique, elles essayent de l’éviter et de trouver une solution pour passer outre en souffrant le moins possible. Quand elle se rendent compte qu’elles ne plaisent pas à la personne à qui elles pensent, elles laissent tomber et tentent de l’oublier. Quand elles sont mal, elles essayent de limiter les dégats.
C’est un mécanisme humain inné. Si ça n’était pas le cas, l’humanité aurait déjà cessé d’exister depuis longtemps et puis, les gens n’aiment pas trop souffrir.

Je crois que je suis masochiste. Pourquoi ne puis-je pas, moi, tenter de me préserver ? Si il y a un mur devant moi, à la place de ralentir, je vais accélérer pour m’y éclater la tête. Je ne prendrais même pas la peine de chercher une solution. Si, lors d’un rare moment de lucidité, je me met à chercher et que par miracle j’en trouve une, je ne l’utiliserais même pas. S’éclater sur un mur, c’est tellement plus simple. Et tellement stupide.
Quand je suis mal, je vais faire tout pour que ça s’empire : écouter de la musique bien déprimante, me traiter de tous les noms possibles, manger comme quatre pour ensuite me trouver énorme, me renfermer sur moi-même et j’en passe !
Le pire, c’est quand même quand quelqu’un me plaît. Là, je suis plus que masochiste : je suis carrément suicidaire. Si je me rend compte que ça ne serait pas possible avec une personne, je foncerais quand même, essayant par tout les moyens que ça marche, alors qu’il est clair par a+b que cette personne ne veut absolument pas de moi. Du genre insistante, il n’y a pas pire que moi. Je peux espèrer, même après plusieurs refus, que cette personne change d’avis et je vais me faire des films en imaginant des scénarios plus farfelus les uns que les autres qui ne se produiront jamais.
Le pire, c’est que je fais ça en ayant toute conscience de ma connerie.

Hier, j’ai été en ville. Normalement, je ne peux plus sortir jusqu’au 15 décembre, la fin des examens, mais comme j’avais bien bosser la journée et que Morgane avait insister toute la semaine pour que je vienne avec elle samedi, je me suis dit que de toute façon je rentrais avant minuit et que, donc, ça n’était pas vraiment une sortie à proprement parler. On devait aller rejoindre Matthieu en ville pour 20h.
Pour finir, Morgane ne vient pas, car elle doit étudier le lendemain et si elle vient, elle reste toute la nuit en ville pour aller à la soirée de la gare. A ce moment là, j’hésite. Matthieu est un amis de Jérémie et je savais très bien qu’il était possible qu’il se ramène. Je me demandais si il ne vallait mieux pas rester chez soi à la place de tenter le diable. Après tout, pour ma santé mentale, moins je verrais Jérémie, mieux je me sentirais.
Je finis par sonner à Matthieu pour lui demander qui il y aurait à la soirée et à quelle heure exactement il sera là. Pour toute réponse j’ai : sonne à Jérémie. Je crois qu’il veut que je me tue, il n’y a pas moyen.
Je sonne donc à Jérémie qui ne comprenait pas très bien pourquoi est-ce que Matthieu m’avait demander de lui sonner et, sur ce point là, je ne pigeais pas non plus. Ne pas essayer de comprendre Matthieu. On se donne rendez-vous à l’arrêt de bus pour aller à Liège.
Déjà, là, j’aurais du me dire "Stop ! N’y vas pas, c’est une très mauvaise idée". Je crois que je me le suis dit, mais que j’ai envoyé cette pensée valdinguer très loin de moi. Je suis conne avec ça. Dans le bus, il n’arrêtait pas de parler et là, je me suis rendue compte que je ne me sentais pas à l’aise : d’habitude, c’est moi qui n’arrête pas de parler sans arrêt. Il parlait, il parlait et, après une bref pause, il m’a dit : "Tu ralais à ton dernier message.". Ca n’était pas une question, juste une constatation. Je n’ai rien répondu, il n’y avait rien à répondre. Oui, c’est vrai, je ralais, mais je m’étais dit qu’il allait faire comme si de rien n’était ou qu’il ne le remarquerait peut-être même pas. Après tout ça reste un mec. Comme je ne disais rien, il m’a dit "Alors ?". Bien sûr que je ralais ! Il n’arrêtait pas de me dire depuis la première fois où l’on était sorti ensemble qu’il ne fallait pas s’attacher et quand je lui ai dit que de toute manière j’avais suivis ses conseils, il m’a répondu "Ah bon ? Tu sais t’empêcher de t’attacher ? Tu devrais apprendre ça au reste de l’humanité." Pauvre con.
Jérémie devait se changer, on s’est donc arrêter chez lui. Deuxième erreur. Qu’est-ce que je vais foutre chez lui ? J’étais mal à l’aise, sans trop savoir pourquoi. En fait, je crois que je ne sais pas trop comment nous considèrer tout les deux. Enfin, maintenant j’ai peut-être trouvé… Bref, lui, il avait l’air super à l’aise. On est monté dans sa chambre et il s’est mis à la guitare. "Save Tonight" de Eagle-Eye Cherry. Faudrait qu’il sache qu’on ne chante pas une chanson à une fille si ça n’a aucune signification. Je crois que la plupart des gens ont oublié que les chansons veulent dire quelque chose et transmette un message, qu’elles ne sont pas là juste pour faire joli ! Je restais loin de lui le plus possible, sans trop me rapprocher, j’aurais envie de l’embrasser aussi non. Je me demandais déjà ce qui m’avait poussé à accepter de venir chez lui. Le pire, ça quand même été quand sa mère est rentrée chez elle. Sa mère l’appelle et il ne lui dit même pas que je suis là. Juste avant, je venais de lui dire que j’étais très mal à l’aise face aux parents que je ne connaissais pas. Ca le faisait rire, le salaud. Au final, c’est sa mère qui nous conduit à Liège et on va manger avec elle. C’était un peu bizarre, mais sa mère est très sympa.

Après, on est arrivé pour 21h dans le centre. Matthieu n’était pas là. On s’est posé dans un café et on a discuté. Ca n’allait pas. Je n’y arrivais pas. On a parlé de la dernière soirée qu’on avait passé ensemble. Du fait que je regrettais. Il ne comprend pas pourquoi je regrette. Il pense que c’est à cause du village. Mais qu’est-ce que je m’en fou de ce village ! Je regrette parce que maintenant je suis encore plus attachée à lui. Il voulait que je lui dise ça ? J’imaginais déjà sa tête… Je lui ai répondu que après la première fois c’était déjà le bordel dans ma tête et donc je ne comprend pas pourquoi je l’avais invité chez moi, car on savait très bien tous les deux comment ça allait finir. Il m’a dit que oui, il savait. En résumé, j’étais un peu son plan cul. Au moins c’est dit. Ce qui est "drôle" dans cette histoire, c’est qu’on avait tous les deux des préservatifs et qu’on a tout les deux dit le contraire. Lui, je ne sais pas pourquoi. Il n’avait peut-être pas envie, pour finir, de faire l’amour avec moi. Moi, parce que je savais qu’après, dans ma tête, ça serait pire encore.
On est pas sorti ensemble, je gardais mes distances. Je savais que si on devait finir par s’embrasser, ça serait de ma faute, pas de la sienne et je voulais éviter ça. Je me disais que j’aurais du rester chez moi. Je n’aurais pas du être là avec lui. A quoi ça sert ? A souffrir encore plus ? Je me rend bien compte qu’il n’y a rien de son côté, mais comme je suis complètement masochise, je vais continuer à insister.
Il m’énerve à me poser des questions qui ne le regarde absolument pas comme : "A quoi tu penses ?". En quoi est-ce que ça le regarde, franchement ? A ce moment là je me demandais pourquoi est-ce que j’avais accepté de venir avec lui. Après dix minutes d’insistance, je lui ai dit que je me demandais pourquoi est-ce que j’étais ici. Il m’a dit que c’était parce que j’avais pris le bus. Je n’ai pas relevé. Si il veut faire semblant de ne pas comprendre, c’est son problème.

En fait, au final, j’ai passé trente minute de ma soirée avec Matthieu et tout le reste avec Jérémie.

Je voudrais lui dire que je me suis attachée, que c’est pour cela que je regrette. J’ai trop peur de sa réaction. D’un côté, si on ne se parle plus, ça m’aiderait peut-être à faire le point et à passer à autre chose. D’un autre, est-ce que j’arriverais vraiment à ne plus lui parler ?
Il pense qu’il est un connard. J’aimerai lui faire comprendre que non. Pour une fois que je m’attache à un mec gentil. Je crois que c’est encore pire que de s’attacher à un con.