Journal d'une boulimique.

Conversation interne.

Petit résumé rapide de la situation : la bloque approche, Gilles me manque, j’ai mes règles. Toutes les conditions sont donc réunies pour que je rentre dans une période de réflexion et d’analyse intense en ce qui concerne ma vie. Il y a donc une conversation intense et quasi constante entre mon "moi sensible", c’est-à-dire celui qui ressent tout de façon exacerbée, et mon "moi rationnel", celui qui essaye de relativiser.
Venez-vous joindre à la fête, on s’éclate ici !

Premier point : la bloque.
Mon "moi sensible" : avec les différentes réformes, j’ai une année assez chargée. Je veux prouver à tout le monde que je suis intelligente et que je peux me démarquer de la moyenne. Réussir en première session et faire une dis, voire une grande dis. J’ai besoin de prouver au monde, et surtout à moi-même, que je ne suis pas juste une débile rigolote.
Réponse de mon "moi rationnel" : tu es loin d’être débile. C’est justement un de tes problèmes. Mais surtout, tu n’as rien à prouver à personne. Tu te connais et tu sais ce que tu vaux. Continues juste à aimer ce que tu fais et à donner le meilleur de toi-même. L’important c’est que tu t’épanouisses, pas d’épater la galerie. Si tu dois avoir une seconde session, tu l’as réussiras et ça ne te rendra pas moins intelligente.

Second point : Gilles me manque.
Mon "moi sensible" : Gilles me manque. Je me sens seule. J’ai tous les jours envie de lui parler. Je ne sais pas de quelle façon il me manque, si c’est en tant que pote ou en tant qu’amoureux. Je ne veux pas qu’il m’oublie, qu’il m’ait déjà remplacé. Si c’est le cas, ça voudrait dire qu’il n’a pas été sincère lorsqu’il me disait qu’il n’était pas prêt, qu’il m’a menti. Je me serais à nouveau fait à voir. Personne ne m’aimera jamais et je vais finir seule avec des chats.
Réponse de mon "moi rationnel" : Wow meuf ! On va tout de suite se calmer. Déjà le fait que Gilles te manque et te sentir seule, ce sont deux choses différentes. Alors tu devrais peut-être faire la part des choses et te rendre compte que, même si tu t’es attachée à Gilles, c’est plutôt le sentiment de solitude qui est dur pour toi en ce moment. Et ça, c’est un autre problème.
Et en ce qui concerne le fait qu’il t’ait remplacé, tu peux bien parler ! T’es déjà sortie avec trois mecs depuis que vous n’êtes plus ensemble… Mais surtout, arrête de jouer la victime. Il ne se sentait peut-être pas prêt avec toi. Ca n’est pas pour autant qu’il t’ait menti. Les sentiments ça évolue, ça change d’une personne à l’autre. Et je te rappelle, que toi aussi tu avais une peur bleue de t’engager avec lui. Tu étais même plutôt soulagée quand c’était fini.
Tu ne vas pas finir seule. Tu as besoin de temps pour te retrouver et surtout, pour régler un problème que tu reportes à plus tard depuis beaucoup trop longtemps…

Ce qui nous amène à un troisième point : la boulimie.
Sur ce sujet, mon "moi rationnel" a plutôt tendance à ne pas trop la ramener. A part des textes de brochures scientifiques, il ne sait pas trop quoi m’en dire d’autres. Et ça n’est pas ça qui m’empêche de me faire vomir.
Je me suis toujours dit que ça allait finir par passer. Que quand je rencontrerai un gars avec qui je me sentirai bien, j’arrêterai de me faire vomir. Aujourd’hui, je commence à me demander s’il n’y a pas une erreur dans mon raisonnement.
Quand Gilles me disait qu’il s’imaginait vivre avec moi, ça ne m’angoissait pas parce que ça allait trop vite. Ca m’angoissait parce que je ne sais pas tenir plus de six jours d’affilés sans me faire vomir. Si j’habite avec lui, le problème va bien finir par se poser. Et même si je finis un jour par lui dire que je suis boulimique, il ne me connaît pas comme ça. Je veux dire, à part ma famille, personne ne me connaît en crise. Personne ne m’a jamais vu engouffré la moitié de la nourriture du frigo pour aller me faire vomir après. Hormis ma famille, pour qui s’est devenu un sujet tabou, personne n’a jamais du s’interroger sur la disparition d’une grande quantité de nourriture.

Je ne sais pas comment j’ai fait pour ne pas y penser plus tôt. Comment ai-je pu croire que ça n’allait avoir aucun impact sur ma vie amoureuse ? Je me sens un peu débile sur ce coup-là. J’ai tellement mis ce problème de côté, ne voulant pas en parler à ma psy quand elle abordait le sujet. Mais là, il est temps que je prenne le problème par les cornes et que je m’en sorte. Et que je fasse tout pour m’en sortir.

Il faut également que j’arrive à en parler. A voix haute je veux dire. Chaque fois que j’aborde le sujet, c’est quand j’ai bu beaucoup d’alcool et c’est sur le ton de l’humour. Il faut que j’arrête avec ça.

La première étape, ça sera d’en parler avec ma psy la semaine prochaine quand je la verrais. Je vais lui demander qu’on rapproche les séances et qu’on se focalise là-dessus. J’ai assez perdu de temps. J’ai assez tourné autour du sujet. Ca n’est pas en faisant comme s’il n’existait pas qu’il va disparaître. Ca fait plus de 5 ans que j’essaye, ça ne fonctionne pas. Il est temps d’aborder une autre approche.

Je me sens maussade ces jours-ci. Les règles, la bloque, Gilles,... Mais je ne me sens pas faible. Je ne me sens pas fragile. Je me sens prête à me battre. Je n’ai pas peur des larmes que je devrais verser ni des difficultés. Je ne veux pas avoir peur. J’en ai marre. J’ai envie d’être libérée et je vais tout faire pour.